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La Reine Meije

Les lampes frontales percent la nuit pour éclairer, tant bien que mal, les lames de gneiss et les dalles de granit. L’escalade est encore facile. Bientôt, les choses se compliquent avec une série de passages « bestiaux »: le Crapaud, le Pas du Chat,  le Dos d’Âne… Le jour se lève enfin lorsque les alpinistes franchissent les pauvres restes du Glacier Carré. Les choses vraiment sérieuses commencent alors avec cette interminable traversée d’arêtes surplombant le vide. Arrivés au sommet, il ne leur manquera que 18 mètres pour dépasser les 4000. Mais quelle importance ! La Meije, avec ses allures de Madone, est à ranger parmi les montagnes magiques comme  le Cervin, l’Ama Dablam ou l’Alpamayo…  qui n’ont que faire de leur altitude !

            Cette « Aiguille du Midi » plonge La Grave dans une ombre qui semble ne jamais finir. Devenue, fort opportunément, « L’œil de Meidjo », puis plus simplement : la Meije, la reine de l’Oisans est un symbole de pureté. Whymper était même persuadé qu’elle ne serait jamais conquise ! Et pourtant… le 16 août 1877, trois silhouettes sortent d’un refuge crasseux pour tenter une nouvelle fois l’ascension. L’époque était alors aux grandes conquêtes : Stanley, ce même été, achevait sa traversée de l’Afrique, de l’Océan Indien à l’Atlantique. Trois silhouettes donc : un  jeune blanc bec, d’à peine vingt ans,  Emmanuel Boileau de Castelnau,   son guide, Pierre Gaspard, un fameux chasseur de chamois et son fils, à peine plus âgé que Castelnau. Il faut les imaginer avec leur corde de chanvre, leurs brodequins cloutés, une lanterne à la main. Le sommet est atteint en milieu d’après midi par Gaspard fils qui hisse ses deux compagnons sur l’étroite plateforme. En arrivant, celui qui devenait devenir Gaspard de la Meije  s’écrie : « Ce ne sont pas des guides étrangers qui arriveront les premiers ».

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